Histoire des ghettos

Le terme de « ghetto » a été initialement donné au quartier juif de Venise, entouré de murs et de portes en 1516 et situé à proximité d’une fonderie (getto ou ghetto en italien). À partir de 1555, l’emploi de ce terme est institutionnalisé par le pape Paul VI pour désigner les quartiers clos et séparés des Juifs, où ceux-ci sont contraints de résider. La réalité des ghettos subsiste jusqu’au XIXe siècle en Europe.

C’est au début de la Seconde Guerre mondiale, en octobre 1939, après l’occupation de la Pologne, que les nazis ouvrent le premier ghetto à Piotrkow (sud de Lodz) pour mettre les Juifs à l’écart et les enfermer. En Pologne, où vivaient plus de 3 millions de Juifs avant-guerre, d’autres ghettos ouvrent ensuite leurs portes et des trains déversent, d’abord dans la région de Lublin, puis dans l’ensemble du territoire, non seulement des Juifs polonais mais également des Juifs autrichiens, tchécoslovaques, allemands... Progressivement la majorité des Juifs d’Europe orientale, expulsés de leur domicile, sont envoyés dans ces ghettos. Avant même le début de leur extermination, ils sont ainsi coupés du reste du monde, confinés dans un espace réduit, et forcés de travailler pour le Reich évidemment sans un véritable salaire.
Dans ces ghettos, en raison de la surpopulation, du manque d’hygiène et de médicaments, la mortalité est très élevée : à Varsovie, au début 1941, on dénombre plus de 2 000 morts chaque mois. Par la suite, le manque de nourriture et d’eau potable aggrave encore les épidémies (choléra, typhus, typhoïde) et, à la mi-1941, avant même le début de la « Solution finale », plus de 400 000 Juifs ont déjà péri dans les ghettos polonais. Il y a eu au total plus d’un million de morts dans ces ghettos, dont un nombre important après l’invasion de la Russie soviétique en juin 1941 et la création de nouveaux ghettos à l’Est, notamment à Bialystok, Brest-Litovsk et Lvov. À partir de juillet-août 1942 les ghettos se vident progressivement de la population juive, avec le début des déportations massives vers Auschwitz, Majdanek et les autres camps d’extermination.
Le « temps des ghettos » est donc considéré comme la première étape du processus génocidaire de la population juive d’Europe centrale ; il a préparé l'« extermination » systématique par fusillades, camions ou chambres à gaz.
Les Juifs ne sont jamais restés passifs dans les ghettos. Ils se sont au contraire organisés un peu partout pour résister et survivre, notamment à Vilna, Czestochova et Varsovie (janvier 1943). En avril-mai 1943, le soulèvement du ghetto de Varsovie, dirigé par Mordekhaï Anielewicz, est parvenu à interrompre quelque temps les convois de déportation vers Treblinka. Les ghettos n’ont donc pas été uniquement des lieux de mort, de passivité et d’individualisme. Ils ont permis à certains Juifs de s’organiser et de préparer très activement une résistance sous différentes formes.
En dépit de conditions de vie épouvantables, on note également une forte résistance spirituelle des Juifs dans les ghettos. La vie intellectuelle et artistique y fut en effet intense, notamment en matière de presse, d’enseignement et de création artistique : poésie, musique, théâtre... Dans le camp-ghetto de Terezin, le dessin, la peinture et même un opéra témoignent de la créativité et des espoirs persistants de la population juive en captivité.
Zermin, PK 689
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